J’ai passé dernièrement un long week-end à Berlin. J’adore séjourner dans cette ville, tout particulièrement en automne. L’ayant visité à trois reprises ces dernières années, j’ai bien mesuré son évolution récente, et j’en retiens deux constats en termes de construction d’une métropole : l’audace architecturale et la mémoire de la Cité.
Berlin est une ville très agréable. Ce qui frappe tout d’abord, c’est l’espace : Tiergarten et de multiples autres vastes espaces verts, de larges avenues, les lacs à proximité. Berlin, c’est aussi la culture et la créativité : elles sont présentes partout, sous forme de musées, de galeries, de décors urbains… C’est aussi, pour qui s’intéresse à l’histoire contemporaine, des lieux forts à « chaque coin de rue » ; le souvenir du Mur et de la guerre froide, mais pas seulement. Je trouve aussi que Berlin, c’est une esthétique urbaine, avec un mélange harmonieux de nature dans la ville, de monuments et œuvres d’art bien mis en valeur, de convivialité urbaine. Et je suis frappé par le nombre d’immeubles à l’architecture audacieuse. C’est vrai pour le secteur du Bundestag ou de la PotsdamPlatz. Le retour de Berlin au rang de capitale a bien sûr favorisé ce renouveau : il n’y a qu’à voir la succession des ambassades et représentation des länder dans ce secteur. Mais on trouve aussi des constructions ou réhabilitations étonnantes, intégrées à leur quartier, qui sont autant d’éléments de valorisation du cadre urbain.
L’autre facette berlinoise qui me marque, c’est l’approche de la mémoire de cette ville. Partout, les souvenirs de l’histoire et du passé sont présents, « intelligemment ». C’est vrai pour les heures de gloire et les moments forts de la Cité. J’ai par exemple découvert cette année la galerie « JFK » et une expo sur le Parlement allemand. Mais c’est vrai aussi pour les épisodes lourds et tragiques de ce passé, notamment sous le nazisme. On trouve à Berlin des lieux qui expliquent la genèse de la Cité : les phases de son développement urbain, son histoire sociale, politique et culturelle, son patrimoine économique. Il existe par exemple un remarquable musée de l’histoire allemande. Concernant le patrimoine économique, j’avais eu la même impression à Munich, une ville qui n’hésite pas à associer à son histoire ses « success stories » de l’entreprise et de la recherche.
Le contraste est assez saisissant avec Lyon. Je trouve que notre ville n’accorde pas assez de place à son passé, ou qu’elle le fait de façon trop sélective en se limitant aux épisodes « clés » de son histoire. On peut aussi regretter qu’elle ne valorise pas plus son patrimoine économique et d’innovation, ses grands entrepreneurs et l’histoire dont ils sont les successeurs. L’approche retenue pour la réhabilitation de l’Hôtel Dieu en est une nouvelle démonstration, alors que le lieu aurait pu servir de phare pour les pôles de compétences de la métropole et de la région.
Certes, nous avons le Musée Gadagne. Je l’ai visité de nouveau récemment. Sa rénovation a permis d’embellir encore le lieu, et ses collections sont dorénavant bien présentées. Mais en quittant le musée, on a l’impression d’avoir survolé l’histoire de la ville, avec des « escales » à des moments clés. Au-delà de ce musée, il est je pense encore nécessaire d’enrichir et d’approfondir la mise en valeur de la mémoire de notre ville, et de mieux en tirer parti pour ses projets.