Pierre Bérat

Engagé pour une droite ouverte, européenne, qui ne se désintéresse pas des Métropoles. Elu régional et municipal de Lyon jusqu'en 2020/2021.

Catégorie : Europe Page 1 of 6

Un chemin pour une relance de l’Europe ?

Une fois passée la polémique du drapeau de l’Arc de triomphe, on ne peut pas dire que la présidence française de l’Union européenne (PFUE) occupe le devant de la scène médiatique. Faut-il s’en étonner alors que quelques sujets arrivent tout juste à surnager dans cette triste (pré)campagne présidentielle ? S’en étonner non mais s’en inquiéter oui… quelle frustration de voir le niveau du débat politique dans notre pays ! On en prend d’autant plus la mesure quand on prend connaissance de l’accord qui a été noué par les partenaires de la nouvelle coalition en Allemagne. Je ne partage pas les orientations politiques de cette coalition mais on ne peut que constater que cet accord a abordé avec précision tous les sujets à enjeux.

Dans ce contexte politique national, Les Echos et l’Institut Montaigne ont publié le 6 janvier un intéressant sondage sur « Les Français et la PFUE » qui donne en fait une photo de la perception de l’Europe par les Français.

1er enseignement marquant à mon avis, si le regard des Français sur l’Union européenne demeure mitigé, la tendance ne semble pas aller vers un approfondissement du divorce : 39 % pensent que l’appartenance à l’UE présente autant d’avantages que d’inconvénients, 27 % qu’elle a plus d’avantages que d’inconvénients et 33 % qu’elle a plus d’inconvénients que d’avantages (mais une part en baisse de 6 points par rapport à 2016). Il semble donc y avoir un espace pour construire quelque chose.

C’est d’autant plus le cas que ce qui devrait constituer la valeur ajoutée de l’Europe semble mieux identifié : ainsi, si 43 % des Français pensent que la France doit produire sur son territoire tout ce dont elle a besoin, presque autant (40 %, + 3) pensent que la France doit s’entendre avec les pays de l’UE pour produire ensemble ce dont ils ont besoin. Une vision qui semble plus en adéquation avec les réalités économiques, financières et technologiques, dans un monde où d’autres puissances sont à l’oeuvre.

De la même façon, on constate que des propositions françaises, qui traduisent bien les priorités de l’UE en termes de valeur ajoutée pour ses Etats membres, sont largement approuvées par les Français : davantage réguler les grandes entreprises du numérique (83 % de favorables), taxer les produits importés dans l’UE dont la production est considérée comme trop polluante (81 %), faire converger les bas salaires (75%).

Il semble donc y avoir une voie pour redonner un élan à l’Europe.

Mais pour ma part il reste une interrogation. Ce sondage montre que ce sont les 35-49 ans qui sont les plus nombreux à exprimer un « rejet » de l’UE. Ils sont 40 % à lui trouver plus d’inconvénients que d’avantages et 63 % à considérer que l’euro a été une mauvaise chose. Pourquoi les Français nés entre 1972 et 1986 sont-ils aussi sévères ou désabusés ? Ce sont les enfants de la crise économique des années 70-80, ceux aussi qui ont assisté jeunes au renforcement de l’intégration européenne, au lancement de l’euro, à l’élargissement de l’UE… cela semble bien le signe d’une attente de réponses plus efficaces à nos défis.

Stratégie régionale pour l’Intelligence artificielle

Voici le texte de mon intervention lors de l’adoption de cette stratégie de la Région Auvergne-Rhône-Alpes lors de sa session du 15 octobre 2020.

“Monsieur le Président,

Notre groupe des élus LR, divers droite et société civile se félicite de la stratégie régionale en matière d’Intelligence artificielle que vous soumettez aujourd’hui à notre assemblée régionale. Dans notre soutien nous soulignons trois aspects : l’ambition, les opportunités et la cohérence.

Oui nous nous félicitons de l’ambition que traduit cette stratégie, celle d’être un territoire leader en Europe et d’en faire un élément du plan de relance. Les technologies numériques qui forment l’Intelligence artificielle sont des technologies clés et incontournables. Elles constituent un marché prometteur et il faut être conscient que ceux qui ne s’y intéresseront pas ne bénéficieront pas des retombées de ce marché, y compris en termes d’emplois, mais seulement des effets défavorables de ces technologies.

Mais l’IA ce n’est pas qu’une question de chiffre d’affaires, c’est aussi une question de souveraineté technologique. Si nous laissons passer le sujet, nous serons à la merci d’acteurs extérieurs. Soyons conscients que le rapport des investissements sur l’IA est de 1 à 2 entre l’UE et l’Asie et 1 à 4 avec l’Amérique du nord. Alors oui, nous pouvons nous satisfaire que notre Région ait une ambition en la matière.

J’en viens maintenant aux opportunités. Cette ambition, elle se construit sur des atouts que possède notre territoire. Celui d’accueillir à Grenoble l’un des trois instituts nationaux, en renfort d’autres capacités de recherche, y compris de majeurs privés comme Atos. Celui de compter d’ores et déjà au moins 200 offreurs de solutions. Celui d’être positionné sur l’IA embarquée. Et celui enfin d’être un pôle majeur en matière d’Industrie du futur, car c’est bien dans ce domaine que l’Europe et la France peuvent gagner la prochaine bataille mondiale du numérique. Il faut pour cela assurer l’essor de l’Intelligence artificielle mais aussi, “à bon entendeur”, investir dans la 5G, dont l’utilité est moins dans nos ascenseurs que dans nos usines. Le premier appel à projets de R&D doté de 15 millions d’euros permettra concrètement de progresser sur le sujet.

Enfin il faut saluer la cohérence de votre approche. Notre Région investit fortement depuis le début du mandat dans des projets qui créent un écosystème favorable à l’Intelligence Artificielle sur notre territoire : notre engagement dans Nano 2022 et notre partenariat stratégique avec le CEA que nous avons auditionné dernièrement en commission Enseignement supérieur et Recherche, le projet de Campus numérique avec ses dimensions industrielles et de sensibilisation des entreprises. Cohérence aussi et intelligence collective, avec la feuille de route qui est définie avec l’Etat. Cohérence enfin avec le soin du Vice-Président Yannick Neuder de bien aligner cette stratégie avec la programmation des fonds européens, afin que notre région bénéficie pleinement de ces financements.

C’est bien cela l’enjeu : celui qu’Auvergne-Rhône-Alpes prenne toute sa place dans un effort européen et français pour développer une Intelligence Artificielle digne de confiance, avec cette spécificité européenne d’une approche transparente qui n’oublie pas les questions d’éthique, notamment pour les applications pour la santé. C’est d’ailleurs pour cela que notre approche de la culture scientifique, technique et industrielle a fait de l’IA l’un de ses sujets prioritaires.

Nous approuvons donc pleinement cette stratégie et vous assurons de notre mobilisation pour sa mise en œuvre.”

Colmatage

La conférence de presse du Président de la République du 25 avril vient enfin d’engager la sortie du Grand débat. Après bientôt six mois de tensions et de mouvement social, il est plus que temps pour le pays de repartir de l’avant.

Si la longueur et la mise en scène de cet échange avec la presse à l’Elysée donne une impression de grand bavardage, et si plusieurs des mesures évoquées restent à préciser ou clarifier, je ne dirais pas comme certains qu’Emmanuel Macron n’a rien annoncé. Il y a bien un certain nombre d’évolutions et de projets dans ses réponses. On retiendra notamment la baisse d’impôt sur le revenu dont devraient bénéficier certains contribuables de la classe moyenne ainsi que le coup de pouce aux petites retraites, et même à l’ensemble des retraites d’ici 2021. Ce sont des avancées. Dans le domaine de l’enseignement supérieur que je suis à la Région, j’ai noté aussi l’annonce d’un développement des filière universitaires courtes.

Des changements sont donc annoncés pour répondre à la colère sociale qui s’est notamment exprimée dans le mouvement des gilets jaunes. Après les premières mesures annoncées en décembre, pour un coût de 10 Md d’euros, les dernières annonces ont aussi un coût conséquent : on parle de 5 Md d’euros pour la réduction d’IRPP, de 3 Md d’euros pour l’indexation des retraites à l’horizon 2021.

Mais pour ma part, ces annonces de décembre et d’avril m’évoquent une double interrogation.

La première est celle de leur financement. Comment cela va-t-il être financé, qui va “payer” ? Les indications manquent de clarté et ne semblent pas à la hauteur du chantier.

La deuxième interrogation porte sur la cohérence de l’ensemble des mesures. Je ne perçois pas comment cela constitue un plan d’ensemble permettant de répondre aux défis du pays. Je n’y trouve pas de réponse à ce qui est à mon avis la problématique essentielle : comment retrouver la cohésion nationale et les marges de manœuvre financières pour que la France soit en mesure de faire face aux enjeux : le vieillissement, l’élévation des compétences, l’innovation, la transition énergétique, la défense… ?

L’éventail des annonces laisse plutôt penser qu’Emmanuel Macron cherche à accorder des avancées à différentes catégories de Français, pour que le plus possible puissent se dire qu’ils ont obtenu quelque chose. Cela rappelle finalement la campagne présidentielle, avec un patchwork de promesses qui n’a pas fait un projet politique cohérent… et qui a conduit à la crise quelques mois après.

Il y a donc de quoi être inquiets quant à la marche en avant que doit reprendre le pays. Et on peut aussi craindre que les élections européennes servent du coup à s’exprimer sur cette sortie de crise. Ce serait dramatique. Car après une élection présidentielle en 2017 qui n’a pas vraiment permis au pays de se prononcer sur le chemin qu’il voulait emprunter, on risque donc de passer à côté d’une élection européenne qui elle-aussi a vocation à trancher des choix importants : sur quels sujets et comment l’Union européenne doit-elle apporter une valeur ajoutée aux pays européens pour faire face aux défis de notre temps…

Et maintenant on s’en sort comment ?

Alors que la crise des « gilets jaunes » dure depuis maintenant plusieurs semaines, avec une tension croissante, l’idée d’un « Grenelle de la fiscalité » fait son chemin, le Gouvernement prenant enfin conscience de la profondeur du mécontentement. Mais un Grenelle de la fiscalité suffira-t-il ?

Le mouvement des gilets jaunes a pour origine (déclencheur) une forte augmentation programmée des taxes sur les carburants. Cette dernière, motivée officiellement par la transition énergétique, a été la taxation de trop, pour des Français qui voient leur pouvoir d’achat se réduire du fait des prélèvements fiscaux et sociaux et des autres dépenses contraintes.

Mais au-délà de ce ras-le bol fiscal, je pense que le malaise national est beaucoup plus profond. Il y a d’abord un clivage entre la France rurale et le péri-urbain et la France des grandes villes. Il s’impose avec cette question du prix des carburants, vécue avec raison comme une injustice par des Français qui n’ont pas de solution alternative à la voiture pour leurs déplacements quotidiens. Il y a là un sujet d’aménagement du territoire, qui était déjà apparu au moment où le Gouvernement fermait des classes dans l’espace rural pour en dédoubler d’autres dans les quartiers « politique de la ville ». Cette équité territoriale s’impose dès lors que l’on considère que la vie et l’activité doivent pouvoir continuer dans tous nos territoires.

Et puis il y a aussi le profond malaise des classes dites moyennes, qui craignent un déclassement, doutent de l’ascenseur social et des perspectives pour leurs enfants. Il y a aussi le malaise des actifs dont le pouvoir d’achat est bloqué alors que les efforts sont croissants.

Alors effectivement, une réforme de la fiscalité, cohérente et globale, peut contribuer à rétablir certains équilibres. Mais cette réponse risque fort d’être incomplète ; parce que la malaise porte finalement sur un pacte national terriblement fragilisé et parce qu’à la base, il y a le problème d’une France qui vit au-dessus de ses moyens depuis trop longtemps. C’est bien d’un nouveau pacte national dont a besoin la France, pacte sur lequel une majorité de Français doit s’entendre. Et c’est bien là la difficulté de la sortie de crise, du fait de la diversité des revendications, des gilets jaunes et d’autres mouvements de protestation : d’un côté il y a des appels à retrouver certains équilibres et de l’autre, une volonté de poursuivre dans la fuite en avant, avec toujours plus de dépense publique, à la mode union de la gauche de 1981… Juste pour illustrer le problème, une question d’actualité dans ce mouvement social de décembre : une majorité de Français est-elle d’accord pour qu’une partie de nos impôts continue de servir à réduire le coût d’inscription dans l’enseignement supérieur des étudiants étrangers, dans une proportion beaucoup plus forte que dans des pays “concurrents” en matière d’enseignement supérieur ?

L’impasse dans laquelle nous nous trouvons n’est pas surprenante. Les élections nationales de 2017, présidentielle puis législatives, ont été tronquées pour diverses raisons. Leur résultat fut spectaculaire, un grand bouleversement, mais sans finalement que la population française se prononce sur ses choix pour l’avenir.

Tôt ou tard, il faudra bien que l’expression de ses choix puisse se faire. Mais sommes-nous encore capables dans ce pays d’avoir une campagne électorale synonyme de débat politique sur le fond ?

Un dernier souhait, que les élections européennes ne soient pas le cadre de cette clarification. La situation nationale est bien sûr liée aux orientations politiques définies par l’Union européenne. Mais il y a une part importante de responsabilité spécifique au Gouvernement de la France. Et par ailleurs, il y a d’autres enjeux qui se posent à l’Europe, notamment au plan géopolitique, dont on peut espérer qu’ils soient traités lors de la campagne européenne.

Deux questions après la tornade médiatique

Le départ de Gérard Collomb du Gouvernement et son retour sur Lyon ont créé le buzz il y a quelques jours, non sans raison… Après, s’il ne voulait plus être Ministre de l’intérieur, mieux valait effectivement qu’un changement intervienne rapidement pour que quelqu’un s’occupe pleinement de la sécurité. Mais après cet emballement médiatique, deux interrogations me semblent d’importance.

Tout d’abord une interrogation sur nos institutions. En quelques mois, nous avons vu se dessiner un panorama préoccupant :

  • une majorité parlementaire écrasante mais qui s’avère sans contenu politique, au bout d’une année seulement,
  • une affaire Benalla dont on nous dit qu’elle est le triste résultat de “dérapages personnels” mais qui pose tout simplement la question de “comment une telle chose peut arriver au cœur de l’Etat ?”. Heureusement que le Sénat est à la hauteur de ses responsabilités avec sa commission d’enquête.
  • des ministres qui vont et viennent au gré de leurs projets et déceptions… On notera que De Gaulle avait eu la sage précaution de prévoir, avec la Ve République, qu’un Ministre quittant le Gouvernement ne retrouvait pas son siège de parlementaire… mais cette sage précaution a été levée depuis…
  • et je terminerai par cette consternante visite du Président à Saint Martin au cours de laquelle, outre des photos décalées, il déplore une reconstruction trop lente… comme s’il n’était pas la première personne en charge…

Tout cela pose question sur nos institutions, et donc sur notre constitution. Gaulliste, je mesure ce que la Ve République a apporté au pays. Mais dans le monde d’aujourd’hui, avec la force de l’hyper-communication superficielle, reste-t-elle adaptée pour assurer le meilleur avenir au pays ? N’a-t-on pas besoin de nouvelles dispositions protectrices, rééquilibrant les pouvoirs ? On pourra me répondre que les comportements présents ne doivent pas faire douter de nos institutions. Le problème c’est qu’une constitution est faite pour éviter ce genre de dérapages.

Pour ce qui est du retour de Gérard Collomb sur Lyon, il m’évoque une autre question. Le sujet du renouvellement a été largement évoqué. Mais qu’en est-il du projet politique ? Gérard Collomb nous dit qu’il revient sur Lyon pour reprendre son action au service du développement de la Métropole. Mais selon quelles orientations politiques ?

Chaque jour, nous pouvons lire dans la presse que telle ou telle composante des majorités municipale ou métropolitaine actuelles n’est plus disposée à suivre Collomb, que ce retour n’emballe pas certains de ses anciens soutiens, et pas seulement pour la perte de pouvoir qui en découle. Alors avec qui Collomb compte-t-il bâtir un projet ?

Dans ce contexte, il serait surtout intéressant que Gérard Collomb nous livre sa vision pour la Métropole. Quels projets en termes d’infrastructures pour assurer les mobilités, quelles initiatives pour affirmer notre rôle de métropole économique européenne, quelle détermination à lutter contre la délinquance (d’autant plus nécessaire quand on a entendu son diagnostic particulièrement lucide à l’occasion de sa passation de pouvoir au Ministère de l’intérieur), quel plan pour faire en sorte que la coûteuse technostructure métropolitaine devienne réellement un facteur efficace de développement et de rayonnement ?

Souhaitons que les prochaines semaines apportent des réponses…

 

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