Pierre Bérat

Engagé pour une droite ouverte, européenne, qui ne se désintéresse pas des Métropoles. Elu régional et municipal de Lyon jusqu'en 2020/2021.

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Effort d’investissement, y compris dans la matière grise !

DSC00525Lors de la session régionale du 14 avril, nous avons voté le premier budget de la grande Région Auvergne-Rhône-Alpes. Malgré les fortes contraintes financières et dans le contexte de volonté de redressement des comptes et des politiques régionales (voir mon dernier post), la Région affirme son effort en matière d’enseignement supérieur et de recherche.

L’enseignement supérieur et la recherche sont des compétences choisies par la Région et l’effort budgétaire décidé par Laurent Wauquiez et le Vice-Président Yannick Neuder confirme que l’investissement dans la formation des jeunes et dans l’innovation sont des priorités régionales, pour valoriser le formidable potentiel d’Auvergne-Rhône-Alpes. 49 millions d’euros sont consacrés à l’enseignement supérieur pour encourager la mobilité internationale des étudiants et soutenir les projets des universités et grandes écoles en matière de vie étudiante, de locaux et de centres d’excellence. 64 millions sont consacrés à la recherche pour des investissements dans des laboratoires et plateformes d’innovations et pour financer des allocations doctorales de recherche.

A la séance d'ouverture de Biovision 2016 pour souligner l'atout que représentent les sciences de la vie pour la région.

A la séance d’ouverture de Biovision 2016 pour souligner l’atout que représentent les sciences de la vie pour la région.

Si l’effort budgétaire est conséquent, la nouvelle majorité compte bien retravailler les priorités pour une plus grande efficacité de la politique régionale. Le nouveau schéma de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (SRESRI) devra traduire ces priorités. Le Vice-Président Yannick Neuder a lancé le travail sur ce schéma lors de notre dernière commission “Enseignement supérieur et Recherche”. On peut d’ailleurs s’étonner que les élus FN et Front de gauche aient fait le choix de ne pas participer à cette commission, pour protester contre l’envoi tardif de dossiers de CP, alors même qu’ils avaient l’opportunité de débattre des orientations stratégiques de la politique régionale

En parlant de nouvelles orientations, l’annonce par Laurent Wauquiez et la Vice-Présidente Béatrice Berthoux, de la création d’une bourse régionale au mérite est un signal fort. Cette promesse de campagne est d’ores et déjà concrétisée. Pour rappel, la Ministre de l’éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem avait décidé de supprimer les bourses au mérite nationales, avant de devoir faire marche arrière. Mais elle a quand même décidé de réduire le montant de ces bourses. La nouvelle bourse régionale va compenser la réduction des bourses nationales. Tous les nouveaux bacheliers de la région ayant obtenu une mention Très bien au bac percevront ainsi une bourse de 500 euros, soutien pour leurs études supérieures.

L’orientation est claire, en matière d’enseignement, il faut promouvoir le mérite !

De moins en moins stratégique

L’examen de la politique des clusters de recherche, lors de la dernière session du Conseil régional, a confirmé que la stratégie régionale de la recherche, comme je l’avais souligné lors de son vote, était décidément bien peu stratégique : la définition des nouveaux clusters de recherche (les ARC ou communautés de recherche académique) qui seront soutenus par la Région s’avère bien peu sélective, voire douteuse sur certains thèmes. Il s’agit plus de faire plaisir à tout le monde que de renforcer les chances de Rhône-Alpes d’être en pointe en Europe et dans le monde sur certaines thématiques de recherche.

Pour se défendre, le conseiller spécial à la recherche, Thierry Philip, joue la carte de la démagogie assumée en disant qu’il laisse les chercheurs décider. On se demande bien dans ce cas pourquoi la Région se donne du mal pour définir une stratégie. Cette affirmation du conseiller spécial est assez savoureuse puisque, dans le même temps, la Région n’a jamais autant cherché à encadrer, par des critères « bien pensants » l’appui aux entreprises et le soutien aux associations (j’y reviendrai prochainement).

Mais j’imagine que le monde de la recherche sait très bien que cette approche peu stratégique va surtout permettre de faire les choix en « petits comités », discrètement, en veillant à ne pas froisser les différentes composantes de la majorité. L’évaluation des anciens clusters de recherche, commanditée par la Région elle-même, avait pourtant montré que ce dispositif avait besoin de choix plus clairs et de transparence dans le fonctionnement.

Bref, tout cela ne sera bon ni pour la recherche rhônalpine, ni pour les chercheurs, ni pour l’institution régionale.

Pour ceux que le sujet intéresse, le texte de mon intervention lors de la session du 1er juillet du Conseil régional.

“Monsieur le Président,

Vous avez l’intention de nous faire ratifier aujourd’hui ce que vous présentez comme des textes techniques de mise en œuvre de la stratégie régionale de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ces textes vont en fait au-delà des simples procédures d’application. Certaines dispositions rentrent dans le « dur » de la stratégie, pour rendre celle-ci concrète. Cela mérite donc un travail approfondi.

C’est particulièrement le cas avec les nouveaux clusters, les communautés de recherche académique. Nous ne sommes pas opposés au principe de ces clusters de recherche, même si nous souhaitons depuis longtemps une meilleure articulation avec les clusters économiques et les pôles de compétitivité.

Le premier problème c’est le passage en force que vous tentez, la concertation sur cet important dispositif ayant été indigente. La stratégie régionale qui a été votée en février annonçait la réduction du nombre de clusters. Mais depuis son vote, aucune information sur les choix en préparation. Votre délibération mentionne une réflexion ; force est de constater que les élus ont été tenus à l’écart. Nous avons découvert il y a quelques jours la liste laconique des nouveaux clusters. Ce n’est pas acceptable. Les amendements déposés par les différents groupes, y compris de votre majorité, démontrent le déficit de concertation. J’ai demandé le retrait du dossier en commission pour se laisser le temps d’approfondir la réflexion. Je regrette que les autres groupes ne l’aient pas soutenue. Je crains que le travail à marche forcée sur ces amendements ne permette pas de rétablir l’équilibre de ce rapport.

Votre rapport définit donc les thèmes des nouveaux clusters, c’est-à-dire les domaines autour desquels vont se structurer des réseaux de recherche.

Ces clusters vont conditionner les allocations budgétaires, donc les priorités de financement de la recherche. C’est bien dans le choix des priorités de recherche que se trouve la réelle dimension stratégique de l’intervention de la Région.

Votre passage en force serait admissible si les thèmes des clusters étaient pertinents. Même si l’on manque d’informations, on peut en douter.

1er constat : même si vous vous abritez derrière des priorités européennes (bravo la subsidiarité !), certains apparaissent très (trop) larges. Santé, environnement, énergie : est-ce que cela fixe réellement des axes de recherche ? Les régions qui gagnent sont pourtant celles qui font le choix des spécificités, de la différenciation. Pour ne prendre qu’un seul exemple, en matière d’énergie, sur quelles sources d’énergie comptez-vous orienter la recherche ? L’ambition de la région ne peut pas se limiter à inciter les laboratoires à travailler ensemble. Il est de sa responsabilité politique de dire dans quelle direction ce travail doit se faire. S’il s’agit d’être aussi vague, voire politiquement correct, un seul cluster « région durable, équitable, citoyenne et solidaire » aurait pu suffire !

D’autres clusters suscitent questions et inquiétudes : que va traiter le cluster « Culture, Sciences, Sociétés et Médiations » ? Quant au cluster « Industrialisation et sciences de gouvernement », nous ne pouvons que nous féliciter de l’intérêt porté à la question industrielle, pour trouver les voies de l’avenir de l’industrie dans notre région. Mais que viennent faire dans cette affaire les sciences de gouvernement : est-ce un retour aux industries industrialisantes, ou pire, une nostalgie de la collectivisation.

La liste des clusters ne semble donc pas pertinente. Les dispositions de mise en œuvre non plus. Votre règlement prévoit ainsi qu’un programme scientifique cadre pluriannuel sera déposé par chaque cluster. Ce programme précisera les procédures et critères de sélection des projets. Un document fondamental : et pourtant notre assemblée ne sera pas amenée à l’examiner.

Les projets soutenus seront certes validés en commission permanente, mais cette phase de validation se fera en fonction d’un cadre qui n’aura pas été défini par la gouvernance politique de la Région. Résultat : soit le contrôle par les élus sera factice, soit il pourra aboutir à des contradictions avec les objectifs des clusters, d’où des recours potentiels des porteurs de projets.

Vous organisez ainsi l’effacement de la Région en matière de politique de recherche. Et pourtant, l’évaluation des anciens clusters avait recommandé d’affirmer la présence de la Région dans leur fonctionnement. Vous faites donc exactement l’inverse.

Autre conclusion notable de l’évaluation des anciens clusters : le nombre insuffisant de projets menés en relation avec les pôles de compétitivité. Force est de constater que les avancées avec les ARC sur cette question sont très faibles, et que vous comptez encore les réduire avec un de vos amendements.

Priorités insuffisantes ou ambiguës, manque d’articulation avec les pôles de compétitivité, effacement de la Région dans le pilotage ; tout cela confirme ce que nous dénoncions lors du vote de la stratégie. Ce n’est pas vraiment une stratégie, c’est en fait un cadre administratif pour subventionner des activités de recherche, avec un manque de transparence patent.

Pour les ARC, l’ouvrage mérite d’être remis sur le métier. Nous vous demandons donc encore une fois de reporter l’examen de ce dispositif à la prochaine assemblée pour se laisser le temps d’une réelle concertation. Nous en avons le temps puisque nous avons voté hier en Commission permanente les dispositions transitoires pour animer les clusters en 2011. C’est l’objet de notre amendement.

Concernant le dossier « Université citoyenne et solidaire », comme nous l’avions signifié lors du vote de la stratégie, nous ne sommes pas favorables à cet appel à projets.

Accroître les compétences et connaissances des étudiants, favoriser leur professionnalisation, ouvrir l’université sur son environnement : tels sont les objectifs de cet appel à projets. Ne s’agit-il pas d’objectifs « naturels » de l’enseignement supérieur ? Est-il besoin d’un appel à projets spécifique sur ces objectifs, avec ce que cela implique de coûts de gestion et de lourdeur administrative ? La réponse est non, à moins bien sûr qu’il s’agisse de satisfaire des exigences de votre majorité : peut-être faudrait-il alors renommer l’appel à projets « université communiste et écologiste ».

Si une incitation supplémentaire doit être donnée sur ces objectifs, elle pourrait tout à fait se faire, à moins de frais, via le processus classique de contractualisation avec les établissements d’enseignement supérieur. Il y a ici une source d’optimisation : pour rappel le budget « Université citoyenne et solidaire » a été de 250 000 euros en 2010. Cela équivaut grosso modo à la baisse des crédits de fonctionnement pour la contractualisation que vous avez engagée en 2011.

Nous confirmons donc notre proposition d’abroger ce dispositif par souci de cohérence et d’économies.”

Des évidences pas si évidentes…

Universite

Lors de la dernière session du Conseil régional, j’étais chargé de défendre la position de notre groupe de l’Union de la Droite et du Centre sur le projet de Stratégie régionale de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation. C’est une question importante tant la formation de la jeunesse et la recherche doivent être des atouts pour faire face aux défis sociaux et économiques de Rhône-Alpes.

Notre groupe politique est favorable à ce que la Région intervienne en matière d’enseignement supérieur et de recherche. Même s’il s’agit d’une compétence optionnelle, cette intervention est opportune compte tenu des enjeux que j’ai évoqués. Nous sommes aussi favorables à l’adoption d’une stratégie par le Conseil régional, car il faut des objectifs clairs et des choix assumés pour que les 130 millions d’euros engagés chaque année sur cette politique soient bien utilisés.

Ceci dit, nous avons considéré que le texte proposé par la « Majorité » était largement perfectible, et qu’il fallait le rendre plus clair, plus ambitieux et plus cohérent (voir mon intervention complète ci-dessous). Nous avons donc proposé des amendements que j’ai défendus. Pour faire court, il s’agissait principalement :

  • d’affirmer dans la stratégie que si la Région s’engage, ce doit d’abord être pour viser le meilleur du Savoir et de la Connaissance, au profit des Rhônalpins, avant de viser d’autres objectifs ;
  • de proposer une approche territoriale de l’enseignement supérieur qui donne leur chance à tous les territoires de la région, et non seulement à certaines villes, à partir du moment où des initiatives peuvent répondre à des besoins économiques et sociaux locaux ;
  • d’amener la Majorité régionale à ne pas se perdre dans sa « traditionnelle » opposition à l’Etat, mais plutôt de faire en sorte de saisir toutes les opportunités de la politique gouvernementale, notamment celle des Investissements d’avenir (Grand emprunt) qui peuvent apporter beaucoup à Rhône-Alpes.

Lors du débat, Thierry PHILIP, conseiller à la recherche et à l’enseignement supérieur, a accepté une partie de ces amendements, semblant prétendre qu’ils ne faisaient qu’affirmer des évidences… (pour les lecteurs qui seraient étonnés de trouver des prolongements à la Région de nos joutes politiques du 3e, je précise que cela est dû au hasard des centres d’intérêt communs !). Mais en réalité, les évidences n’étaient pas si évidentes que cela, puisque si le PS a accepté certains amendements, Europe Ecologie Les Verts les a refusés. Deux exemples :

  • J’ai proposé que la politique régionale en faveur de l’enseignement supérieur vise d’abord à « Aider les établissements à mener leurs projets d’excellence et à développer leurs spécificités », mais cet objectif a été jugé non admissible par les Verts (sans doute trop élitiste) !
  • J’ai aussi proposé que la Région soutienne si nécessaire les projets retenus dans le cadre des Investissements d’avenir répondant aux orientations de la stratégie. Là encore cela n’a pas été jugé admissible par les Verts, qui excluent ainsi un soutien de la Région à ces projets.

Qu’est-ce que cela montre ? Que la stratégie proposée par l’exécutif régional est factice, et que le texte masque en fait des désaccords de fond entre les composantes de la majorité sur ces domaines stratégiques que constituent la Recherche et l’Enseignement supérieur. Quand on creuse, au-delà du verbiage, ça coince ! La fin du débat l’a confirmé avec le refus d’Europe Ecologie Les Verts de voter cette stratégie : par ce geste de défiance, cette composante importante de la Majorité a montré que cette « Majorité » elle-même est factice.

Face à ces constats, notre groupe politique a estimé qu’il n’était pas possible de cautionner l’engagement de la Région sur un document qui ne constituait en fait pas une feuille de route claire. Nous avons donc voté contre le texte, Françoise GROSSETETE précisant que cela ne nous empêcherait pas de soutenir et de « sauver » le cas échéant tous les projets de recherche et d’enseignement qui seraient menacés par la guerre des gauches.

Sur le reste de la session, je vous invite à lire la presse : les divergences et les affrontements entre PS et Verts se sont étalés au grand jour sur d’autres sujets comme le développement économique, la formation, le dialogue social… le tout vendredi dans une atmosphère de conflit social avec la manifestation des personnels du Conseil régional. Triste situation pour notre région. Vendredi dernier, le Conseil était plus que jamais un bateau ivre…

100_0151“Intervention de Pierre BERAT, groupe UDC-APP, lors du vote de la Stratégie régionale de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, par le Conseil régional Rhône-Alpes le 24 février 2011 

 Fidèles à nos positions depuis que la Région est une collectivité territoriale, nous sommes favorables à son engagement, au cours de ce mandat, en matière d’enseignement supérieur et de recherche. Nous le sommes parce que nous pensons que la connaissance et l’innovation sont nos premiers atouts pour faire face à nos défis et pour assurer le développement économique et social de cette région. Nous le voulons, avec une véritable ambition, comme ont su l’initier et le réaliser, au sein de notre Assemblée, Xavier HAMELIN ou Alain MERIEUX.

Nous sommes également favorables à ce que cette intervention se fasse dans le cadre d’une stratégie régionale. Nous souscrivons à l’évolution affichée, le schéma laissant place à une stratégie : il faut effectivement des objectifs clairs, pour le moyen et le long terme, et des choix assumés sur les priorités.

Ceci étant dit, nous pensons que la stratégie régionale que vous soumettez à notre approbation n’est en l’état pas satisfaisante. Nous voulons, par nos amendements, donner une plus forte ambition et une meilleure cohérence à ce texte qui va constituer un cadre de référence.

Ces évolutions que nous préconisons, se basent non pas sur vos commentaires médiatisés, mais bien sur le texte, puisque c’est cela qui compte. Et nous encourageons l’ensemble des acteurs de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’économie à faire de même. Le service avant-vente et les déclarations politiques se perdent, mais les écrits restent, et ce sont eux qui vont déterminer l’engagement de millions d’euros d’ici 2014.

1)    Affirmer un objectif fondamental : viser le meilleur de la connaissance

 L’engagement de la Région sur une compétence optionnelle, qui mobilise chaque année près de 30 millions d’euros, pour la contractualisation avec les établissements, ne peut se justifier que s’il vise en priorité, les objectifs premiers de l’enseignement supérieur et de la recherche : la production de connaissances et de savoirs, et ce au profit de la région et de ses habitants.

Force est de constater que cette dimension est un peu oubliée. Il est quand même frappant de constater que votre 2e objectif, c’est d’impulser un débat citoyen sur les concepts d’innovation et d’excellence !

 Quelle est votre vision ? On débat ici en Rhône-Alpes du concept d’innovation et d’excellence, pendant que cette innovation et cette excellence se concrétisent sur le plateau de Saclay, à Munich ou en Californie. Quelle est la perspective ? Un futur pôle de compétitivité rhônalpin en « glose scientifique », pendant que les opportunités d’emplois pour les chercheurs et ingénieurs en R&D se trouveront en Ile-de-France, en Allemagne ou en Corée.

Il est aussi frappant de constater que le premier objectif que vous vous donnez en matière d’enseignement supérieur, pour favoriser la réussite des étudiants, « ce sont des actions ambitieuses et structurées de réorientation ».

 Que sont d’abord en droit d’attendre les Rhônalpins d’une politique régionale d’enseignement supérieur ? C’est de contribuer à offrir à nos jeunes, des voies du savoir à succès. Il faut assurer les conditions pour que tout jeune Rhônalpin puisse accéder, en Rhône-Alpes, demain comme aujourd’hui, au meilleur du Savoir, comme c’est le cas à Cambridge, Berkeley ou Kyoto, et comme ce sera le cas demain à Pékin ou Bangalore.

Rhône-Alpes peut-elle se passer d’une mobilisation générale sur le meilleur de la connaissance ? Nous ne le croyons pas, et visiblement nous ne sommes pas les seuls.

 Que nous dit le rapport d’évaluation des stratégies régionales d’innovation, réalisé pour la Commission européenne en juillet dernier : « les partenaires – rhônalpins – appréhendent depuis plusieurs années un risque de décrochage par rapport aux régions européennes les plus performantes. Dans ce contexte, les principaux enjeux de la région en termes d’innovation consistent tout d’abord à assurer la croissance de son économie en s’appuyant sur des domaines d’excellence. » ?

Que lit-on dans l’avis du CESER : « Le décrochage pourrait être très rapide sans une mise à niveau d’un certain nombre de fondamentaux tels que les compétences et savoir-faire » ?

Que lit-on enfin dans l’Initiative phare Europe 2020 : une Union de l’innovation ; « L’excellence doit plus que jamais être le mot d’ordre » ?

 Vous semblez craindre ce terme « Excellence ». Mais excellence, cela ne veut pas dire nécessairement élitisme, ce peut être viser le meilleur du Savoir pour tous. L’action volontariste que nous menons, en matière de mobilité internationale des étudiants, relève d’ailleurs de cette logique, dans la mesure où elle répond notamment aux besoins d’amélioration du niveau de pratique des langues étrangères.

 L’exposé du Président du PRES de Grenoble, lors de notre dernière commission n°3 a bien montré comment un projet scientifique et de vie étudiante pouvait donner toute sa place au meilleur de la connaissance, en se projetant sur les 15 ans à venir.

Je souscris aussi à l’avis du CESER qui suggère que la stratégie vienne renforcer l’excellence en veillant à ce qu’elle ait un rôle d’entrainement sur son environnement.

C’est très différent de votre approche qui vise à faire de l’intervention régionale en matière d’enseignement supérieur et de recherche, un supplétif des politiques d’aménagement du territoire, de la jeunesse ou de la coopération internationale. Tout cela nous conforte dans les craintes que nous pouvions avoir en début de mandature du fait de l’absence d’un Vice-Président de plein exercice à la recherche.

Nous vous proposons donc avec nos amendements, j’allais dire très logiquement, d’affirmer que le premier des objectifs de la stratégie régionale, c’est de contribuer à renforcer les performances de l’Enseignement supérieur et de recherche au profit des Rhônalpins.

2)    Une stratégie… plus stratégique

Vous avez accompli une évolution de dénomination, passant de schéma à stratégie. Mais le document que vous nous soumettez est-il réellement une stratégie ?

Le propre d’une stratégie, c’est de faire des choix. C’est ce que dit l’Initiative phare Europe 2020 : une Union de l’innovation ; « Le FEDER doit se fonder sur des stratégies de spécialisation régionale intelligente ».

En quoi la stratégie que vous nous proposez affirme-t-elle des choix ? Quels sont les principaux domaines de recherche, les technologies, les plus prometteurs, sur lesquels nous devons miser ?

Vous nous dites que la stratégie donnera à la Région les moyens d’affirmer des choix, en privilégiant des axes et des secteurs d’activités : cette stratégie ne devrait-elle pas elle-même tracer des perspectives ? Peut-on en la matière s’en remettre aux orientations données par l’Europe ? Peut-on raisonnablement penser que ces choix pourront s’opérer dans le cadre de la Conférence régionale que vous allez mettre en place ?

Le propre d’une stratégie c’est aussi de préparer l’avenir, le long terme. Le CESER le rappelle fort justement dans son avis : « Une réflexion stratégique nécessite de se placer dans un horizon temporel long, qui dépasse très largement les 5 ans, pour identifier les futurs possibles ».

Vous avez dit en Commission Monsieur PHILIP que la stratégie régionale, par définition, devait se donner comme horizon temporel 2015. Oui pour ce qui est de la programmation des moyens, mais les résultats à atteindre peuvent bien être prévus pour un horizon 2020. Cela demande du courage politique, une certaine abnégation. Mais il ne saurait y avoir de bonne stratégie calée uniquement sur des objectifs de moyen terme, fortement liés aux échéances électorales territoriales.

3) Ne pas se perdre dans une opposition stérile à l’action du Gouvernement

Les motifs de votre projet de stratégie régionale témoignent d’une posture anti-gouvernementale. Ce n’est bien sûr pas une surprise puisque nous avons pris l’habitude d’un tel discours.

Nous le regrettons parce que la posture « les régions contre l’Etat » est dommageable pour notre pays. Nous le dénonçons particulièrement en matière d’enseignement supérieur et de recherche car cette posture risque de nous faire perdre des opportunités.

En gros votre approche c’est « trouvons toutes les initiatives pour nous distinguer du soutien de l’Etat, même si cela doit nous amener à négliger l’excellence ». Notre approche est différente : nous pensons qu’il faut une mobilisation générale pour que Rhône-Alpes soit dans le top 10 des régions européennes.

Ainsi, la question, ce n’est pas que la région soit un co-financeur passif, comme vous le dénoncez concernant les relations avec l’Etat. La question c’est de savoir si nous sommes prêts à une fédération stratégique des financements.

A quoi cela sert-il de dénoncer les initiatives de l’Etat comme l’Opération Campus ou le Grand Emprunt ? Les 975 millions d’euros consacrés par l’Etat au plan Campus ne sont-ils pas une bonne chose pour Rhône-Alpes, pour améliorer les conditions d’études sur nos campus ?

Et pourquoi refuser de tirer parti des opportunités liées aux Investissements d’avenir ? Voilà une initiative majeure du Gouvernement, qui mobilise 23 milliards d’euros du Grand emprunt pour la recherche et l’enseignement supérieur.  Voilà une initiative qui va faire émerger des projets, et retenir les meilleurs sur la base des conclusions de jurys internationaux. C’est une formidable opportunité pour identifier des projets prioritaires et dégager des financements. Votre approche politicienne risque de nous en priver.

Vous souhaitez avec raison promouvoir les sciences humaines et sociales. Il y a un champ d’investigation qui pourrait être traité par nos écoles de sciences politiques. C’est celui de la schizophrénie institutionnelle qui frappe notre collectivité. On ne peut pas en même temps, dénoncer les initiatives politiques gouvernementales, comme vous le faites avec les Investissements d’avenir, et venir vous féliciter et vous attribuer les dynamiques impulsées et soutenues par ces initiatives de l’Etat, cf. le communiqué de presse enthousiaste que vous avez publié au lendemain de la sélection des équipements d’excellence.

Il faut une certaine cohérence de l’approche.

En matière de cohérence également, je ne résiste pas non plus à citer vos propos concernant la « métropolisation », que vous présentez comme « revendiquée par l’Etat » et dont il faudrait freiner les effets néfastes. Mais dite moi, le premier promoteur de cette métropolisation ne serait-il pas Monsieur Gérard COLLOMB dont vous être Monsieur PHILIP le Vice-Président au Grand Lyon ?

Vous dénoncez les effets inégalitaires de la métropolisation et vous en appelez à une Région régulatrice, ce à quoi je souscris. Mais dans ce cas, pourquoi avoir fait approuver la convention de fonctions d’agglomération avec le Grand Lyon, avant même d’avoir faire voter les stratégies de développement économique et de recherche. Est-ce la meilleure façon de défendre le fait régional ?

Nous vous proposons, avec nos amendements, une approche dépassionnée de la question, qui donne toutes ses chances à Rhône-Alpes de saisir les opportunités qui se présentent à elle. 

4) Une gouvernance régionale rapprochée

 Un mot enfin sur la gouvernance de cette politique régionale.

C’est un point important. L’évaluation du schéma 2005-2010 a pointé que cette gouvernance a jusqu’à maintenant manqué de transparence, reposant trop sur des relations bilatérales au « sommet » entre l’exécutif régional et les établissements d’enseignement supérieur et de recherche.

Vous proposez une Conférence régionale réunissant l’ensemble des acteurs. Cette approche participative est sans doute utile. Mais compte tenu des missions importantes que vous entendez confier à cette conférence, en matière de propositions d’orientation de cette politique régionale, il nous semble que la présence des élus régionaux, de l’ensemble des groupes, doit être plus forte, et qu’elle ne peut se limiter à un rapport annuel de la Conférence devant la commission n°3.

Nous regrettons par ailleurs certaines rigidités instituées par la stratégie en matière de dispositifs d’intervention.

Nous vous proposerons donc des amendements permettant une gouvernance régionale rapprochée, redonnant plus de marges de manœuvre à notre assemblée.

 Vous aurez compris notre position :

  • Oui à une intervention de la Région en matière d’enseignement supérieur et de la recherche, pour que notre région prenne en main son avenir,
  • Oui à la définition d’une stratégie régionale, mais une stratégie :

–          Qui se fixe clairement pour premier objectif le meilleur de la connaissance, au profit des Rhônalpins,

–          Et qui ne se prive pas, pour des raisons politiciennes, des opportunités suscitées par la politique gouvernementale.

  • Oui à la définition d’une stratégie, véritable cadre de référence pour la politique régionale, mais avec une gouvernance rapprochée, donnant toute leur place aux élus régionaux, garant de l’intérêt régional.

C’est le sens de nos amendements.”

Mais que veulent-ils ?

Alors que Nicolas Sarkozy se démène, dans l’Union et en France, comme il l’avait fait fin 2008, pour trouver des solutions aux tensions financières et monétaires en Europe, c’est la cacophonie du côté du PS. Il est bien difficile de savoir quelle serait la politique d’un Gouvernement de gauche pour répondre aux enjeux économiques et sociaux du moment, au-delà de l’apologie du « Care ».

Nous avons d’abord assisté à l’échange d’amabilités entre Gérard Collomb et Martine Aubry sur le projet économique du PS. Le Maire de Lyon dénonce une vision trop protectionniste et déclare ainsi à propos de ce projet « on ne peut pas raconter n’importe quoi ». Réponse de la bergère au berger : « il n’a rien compris au projet » !

Même cacophonie fondamentale sur l’âge légal du départ en retraite. Aubry et Hamon refusent une solution au problème du financement des retraites consistant à repousser cet âge légal au-delà de 60 ans. On a compris, lors de son interview de jeudi soir, que Dominique Strauss-Kahn n’était pas bloqué sur cette question et qu’il était prêt à tenir compte de l’allongement de la durée de la vie.

Parenthèse : concernant DSK, on peut aussi se demander ce qu’il veut. Il s’investit dans une interview sur France 2 largement médiatisée, visant clairement l’opinion française, pour nous dire « laissez moi travailler au FMI »…

Divergences majeures donc. Et encore, nous n’en sommes qu’au débat interne au sein du PS. Qu’en sera-t-il quand ils devront s’entendre avec leurs « alliés » ?

Il y a au moins un axe clair, c’est celui du toujours plus de pression fiscale. Avec les propositions du PS pour financer les retraites, c’est effectivement un choc fiscal qui nous attendrait dans les années à venir si ce projet était mis en œuvre. J’entendais hier Michel Sapin, ancien Ministre PS, s’étonner que la France ait été le seul pays à baisser les impôts ces dernières années. D’abord, je ne suis pas sûr que nous soyons les seuls. Ensuite, il faut surtout avoir à l’esprit que notre pays est un de ceux qui connaît le plus haut niveau de prélèvements.

C’est avec le même réflexe de « fuite en avant fiscale » que Thierry Philip, en tant que Conseiller à la recherche et à l’enseignement supérieur de la Région, a exposé jeudi dernier en commission les orientations de la majorité régionale pour le mandat 2010-2014. Il a ouvert son exposé par une (nouvelle) dénonciation de la réforme de la taxe professionnelle, pour déplorer que les nouvelles recettes fiscales ne soient pas suffisamment « dynamiques » pour dégager des ressources nouvelles. Par dynamiques, il faut je pense comprendre qu’il ne sera plus possible d’accroître les taux d’imposition. Mais c’est oublier que l’assiette d’imposition reposant sur la valeur ajoutée des entreprises devrait elle-même croître. Mais surtout, cela dénote que la question de l’optimisation des dépenses n’est pas envisagée. Toujours la logique « fiscaliser + pour dépenser + ».

Retour sur posts

L’actualité des derniers jours m’amène à revenir sur deux sujets traités dans des posts récents. Celui sur la scène médiatique tout d’abord, avec une distinction qui n’a pas à mon avis retenu toute l’attention qu’elle méritait. Ceux sur le grand emprunt national ensuite avec la remise du rapport de la Commission Juppé-Rocard.

Après la mise en ligne de mon post « apprentis sorciers », une amie a attiré mon attention sur un bon exemple de partialité de la scène médiatique : celui de la distinction par le Financial Times de Christine Lagarde en tant que meilleur ministre européen de l’Economie et des Finances. Il est vrai que cela ne cadre pas vraiment avec la mode du « chaos national » que certains cherchent à promouvoir. C’est une belle reconnaissance de l’efficace réaction française lors du déclenchement de la crise financière, mais aussi, et il est important de le souligner pour éviter les lectures erronées de ce palmarès, pour la performance de la ministre sur la scène internationale quand il a fallu traiter de la réglementation des banques. Quel écart entre cette distinction et le pathétique spectacle du week-end précédent offert par Ségolène Royal !

Autre retour sur posts : le grand emprunt national. La commission Juppé-Rocard a remis son rapport sur les investissements d’avenir à financer par cet emprunt. Nicolas Sarkozy se prononcera sur les conclusions début décembre. 1er constat : les propositions sont effectivement bien tournées vers l’avenir. On peut ainsi saluer le fait que sont envisagés des projets dans la société numérique (avec un équilibre entre infrastructures et usages/contenus), les véhicules du futur, les énergies décarbonées (y compris le nucléaire du futur), et le développement des villes durables (trouver le moyen de concilier la nécessaire densification des villes avec la qualité de vie). L’enseignement supérieur et la recherche se taillent la part du lion, avec heureusement des garanties quant au ciblage et à l’efficacité des investissements. Il ne s’agit pas de financer le fonctionnement courant : il est sans doute utile de le rappeler quand on lit les récents écrits sur le sujet du Maire du 3e, 1er représentant de Ségolène Royal sur l’arrondissement. Le soutien aux PME n’a pas été oublié, notamment pour dégager les financements nécessaires à leur croissance. Il faudra toutefois être vigilant à ce qu’elles bénéficient des retombées des investissements en recherche.

La perspective d’un emprunt auprès des particuliers s’éloigne encore pour limiter le coût. L’essentiel, c’est de trouver le moyen de faire adhérer les Français d’une façon ou d’une autre à ces investissements pour l’avenir.

Ces propositions nécessitent la mobilisation de 35 milliards d’euros, un montant qui permet d’éviter une montée des taux d’intérêt préjudiciable à l’ensemble de l’économie. Sur ces 35 milliards, 13 milliards proviendraient des sommes remboursées par les banques. Tiens, vous vous rappelez le battage médiatique de la gauche début 2009, qui tendait à faire croire que le Gouvernement n’avait qu’une priorité, celle d’enrichir encore les banques…

Pierre Bérat

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